Comment trouver le bonheur en soi ? #1

Rencontre avec le Dr Xavier Amiot, amoureux de la vie, conférencier et auteur du livre « trouver le bonheur en soi ».

1er volet : apprendre à gérer ses émotions et déprogrammer son passé pour retrouver son moi originel.

Xavier Amiot, trouver le bonheur en soi« Tombé dans le bonheur quand il était petit », il découvre la thérapie cognitive comportementale, alors qu’il est médecin généraliste. Le Dr Xavier Amiot a commencé à animer des conférences, il y a environ 12 ans, d’abord auprès de ses confrères puis auprès d’un large public. C’est un problème de santé qui le cloue au lit, qui lui donne l’opportunité et le temps d’écrire un livre dans lequel il transmet son expérience de la thérapie cognitive et dans lequel il décrit sa méthode pour « trouver le bonheur en soi ».

Lors de notre rencontre, il nous partage sa vision du bonheur et nous indique sa méthode pour y arriver. 

Bonne écoute 😉

Rémi


« Une fois que j’ai compris que l’on pouvait partager le bonheur, alors j’ai essayé de le partager.  (…) Je voulais écrire quelque chose que je ressentais vraiment et que je pouvais transmettre »


Rémi LEVY : Dr Amiot, je voulais vous rencontrer car vous êtes l’auteur du livre « Trouver le bonheur en soi ». Pourquoi avoir écrit ce livre ?

Dr Amiot : J’ai eu cette chance de tomber dans le bonheur quand j’étais petit, c’est ce que dit ma femme. Je suis comme Obélix, je n’ai pas besoin de boire un remède, j’en ai eu assez et je n’ai pas le droit d’en reprendre. Mais c’est une chance. Je n’ai jamais compris pourquoi certains ont tout pour le bonheur et d’autres pas. Il fallait donc que je développe ça.

J’ai eu la chance de découvrir la thérapie comportementale et cognitive avec les Canadiens. C’était passionnant car ils sont très en avance sur nous, sur la prise en charge des problèmes psychiques dus à l’obésité en particulier. Je me suis tout à fait reconnu dans cette approche et, il y 12-13 ans, j’ai commencé à faire des conférences. Au début, je ne m’adressais qu’aux médecins, aujourd’hui, je m’adresse à un large public.

J’ai eu la chance de faire partie de ceux qui ont été passionné par le métier, et ce, dès l’âge de 5 ans, alors que je n’étais pas destiné à être médecin. Et dans ce métier, quand on n’est pas passionné, ça doit être très compliqué.

« On a deux vies et la deuxième commence quand on se rend compte qu’on n’en a qu’une », j’ai connu ça dès l’âge de 22 – 23 ans je crois. J’étais très en avance. Et une fois que j’ai compris que l’on pouvait partager le bonheur, alors j’ai essayé de le partager.

A l’origine, un problème de santé qui m’a cloué au lit il y a quelques temps. Ma femme m’a conseillé d’écrire quelque chose pour m’occuper… Cela faisait suite à mes conférences où les gens, à la fin, me demandaient souvent un papier. Mais je n’avait rien à leur donner, d’où l’idée d’écrire un livre. J’ai trouvé le titre « Trouver le bonheur en soi ». C’est donc grâce à un problème de santé que j’ai pu écrire ce livre. Je remercie fortement le problème de santé !

Avant d’écrire ce livre, j’étais allé voir un psychanalyste, renommé pour prendre les gens en charge pendant 30 ans, à raison d’une séance par semaine. Il m’a demandé ce que je venais faire là et m’a dit que je n’avais rien à faire là car j’avais tout compris. C’était ce que je voulais entendre. Mais je ne voulais pas écrire un livre dans lequel je disais aux autres ce qu’il fallait appliquer sans l’appliquer moi même ; ça m’aurait gêné. J’aurais eu l’impression d’être un usurpateur. Je voulais écrire quelque chose que je ressentais vraiment et que je pouvais transmettre.


« Le moi originel c’est ce que l’on a à la « naissance », et même avant la naissance, avant que l’on ait des perturbations créés par les autres. (…) Si l’on reste avec des croyances et des devoirs qui nous ont été inculqués mais qui ne correspondent pas à notre moi, on ne sera jamais soi même. »


RL : Je vais prendre quelques exemples du livre, j’ai retenu cette phrase : « pour espérer atteindre le bonheur, il est impératif de retrouver son moi originel ».

Dr Amiot : Le moi originel c’est ce que l’on a à la « naissance », et même avant la naissance, avant que l’on ait des perturbations créés par les autres. Les autres vous créent des perturbations, vous donnent des principes, des croyances, des devoirs : « Il faut, « Tu dois » « Il faut, « Tu dois » … Pour retrouver ce moi originel il faut reprendre tout depuis le départ et se poser la question de ce que je garde et qui correspond vraiment à moi et ce que je ne garde pas. Mais si l’on reste avec des croyances et des devoirs qui nous ont été inculqués mais qui ne correspondent pas à notre moi, on ne sera jamais soi même.

Pour cela il faut faire un retour sur soi. Vous avez parlé de méditation, c’est une des meilleures solutions. Il y a la psychanalyse mais, comme je l’ai déjà dit, je n’ai, personnellement, pas eu besoin de ça. Pour moi, c’est plus la méditation, la marche, la nature, le jardinage qui fait que l’on peut revenir sur son soi et se dire que certaines choses ne nous correspondent pas.

Les injonctions telles que « tu dois aimer ton père, tu dois aimer ta mère » doivent être questionnées. Si ce sont des gens détestables, on a le droit de ne pas les aimer. Ce n’est pas un devoir c’est un ressenti, ça n’a rien à voir. Nous avons beaucoup de choses qui nous ont été inculqués et qu’il faut revoir. Certaines que l’on garde et d’autres que l’on rejette. C’est à ce moment là que l’on va être soi.

Pour moi, être soi, ce n’est pas seulement être acteur de sa vie mais metteur en scène : ne pas laisser les autres vous mettre en scène sinon vous êtes manipulé. Il y a une notion de manipulation dans l’absence de moi originel, c’est que l’on a été un petit peu manipulé, un peu façonné : « Tu dois suivre l’exemple de ton père », « tu dois faire ceci », « tu dois faire cela ». On a besoin de se poser les bonnes questions : « Est-ce que tu penses qu’il est bon de suivre ton père ? » Si l’on pense que non, alors il ne faut pas le faire. Donc le moi originel c’est ce que l’on veut réellement être et non pas ce que l’on a voulu que l’on soit.


« On ne peut pas gérer une émotion mais on peut gérer la pensée qui a été à l‘origine de l’émotion. (…) Si vous vous mettez à pleurer pour une catastrophe qui ne vous concerne pas, alors c’est inutile, c‘est de l’énergie que vous dépensez sur vous et que vous n’avez plus pour autre chose. »


RL : Dans votre conférence, vous dites qu’il est nécessaire d’apprendre à gérer ses émotions. Concrètement, comment fait-on pour gérer ses émotions ?

 Dr Amiot : Y a plusieurs façons. La meilleure façon c’est la thérapie cognitive. C’est-à-dire que dès que vous avez des émotions, vous essayez de retrouver la pensée qui a été à l’origine de l’émotion, et vous voyez si cette pensée n’est pas excessive et n’a pas entraîné de ce fait une émotion excessive.

On ne peut pas gérer une émotion mais on peut gérer la pensée qui a été à l‘origine de l’émotion. Si vous avez eu une grosse émotion et que la pensée que vous avez eue est excessive (par rapport à ce que vous devriez penser face à l’événement que vous avez vécu), alors vous avez une émotion trop forte. Comme l’émotion mange une énergie qui n’est pas utile, il est préférable de gérer au fur et à mesure.

Souvent les gens ont le même type d’émotion. Certains sont en colère à chaque fois. Certains sont tristes pour un rien. C’est rare qu’ils aient les deux. On a des personnes tristes ou des personnes coléreuses. Certains, dès qu’il y a le moindre petit problème sont en colère donc il faut gérer la colère. Et pour ceux qui sont tristes, il faut essayer de trouver des pensées un peu moins irréalistes.

J’emploie le mot irréaliste dans la question des émotions. Donc, souvent on a des émotions qui ne sont pas en rapport avec l’événement. Si l’événement est très grave, il est normal d’avoir des émotions à 9/10 mais si c’est une bricole, je ne vois pas pourquoi l’on se gâcherait la vie avec des émotions inutiles. Le but est d’éliminer 90% de ses émotions, parce qu’il y a 90% d’émotions qui sont totalement inutiles.

RL : Vous avez un exemple ?

 Dr Amiot : Par exemple la télévision. Si vous vous mettez à pleurer pour une catastrophe qui ne vous concerne pas, alors c’est inutile, c‘est de l’énergie que vous dépensez sur vous et que vous n’avez plus pour autre chose. Vous pouvez avoir de l’empathie, c’est-à-dire vous dire que c’est triste pour ceux qui le vivent, mais pourquoi, vous faire vivre ce moment là ? Si, sur la route, vous voyez quelqu’un passer au rouge mais que vous n’êtes pas concerné (car il ne vous rentre pas dedans) ce n’est pas la peine de se mettre en colère, c’est son problème car il ne s’est rien passé.

Il y a plusieurs petites émotions journalières liées à des choses telles qu’un feu rouge grillé ou une priorité grillée, ce n’est pas bien mais, ce n’est pas la peine de ressasser cela pendant 10 minutes. C’est de l’énergie qui est inutilement gaspillée.


« Le but est de vivre pleinement l’instant présent sans avoir de pensées négatives ou tristes qui vous viennent du passé.  (…) Pourquoi souffrir de quelque chose dont on n’est pas responsable ?


RL : Pour arriver à ce moi originel, il faut déprogrammer son passé. Comment cela se passe-t-il ?

Dr Amiot : Déprogrammer son passé, c’est faire en sorte que le passé ne soit plus une nuisance pour votre présent. Le but est de vivre pleinement l’instant présent sans avoir de pensées négatives ou tristes qui vous viennent du passé (un divorce, le décès d’un proche…). La période de deuil est nécessaire mais cela ne doit pas rester une plaie après.

La déprogrammation se fait en 7 étapes :

  1. Savoir quel est l’événement qui a pu vous marquer au point de nuire à votre présent.
  2. Trouver ce que l’on a mis en place pour ne pas souffrir et l’éliminer, tel que manipulation, déni, évitement.
  3. Libérer la colère, si l’on a une colère : on peut, par exemple, avoir une colère contre la mort. (par exemple, ne pas accepter la mort d’un proche).
  4. Déculpabiliser, éviter d’avoir de la tristesse excessive.
  5. Faire son deuil.
  6. Accepter le fait d’avoir vécu quelque chose même si c’est gravissime. J’ai suivi quelques femmes qui avaient été violées, il est vrai que c’est gravissime mais on peut « vivre avec », une fois que l’on a déprogrammé (sans gâcher toute sa vie à cause de quelque chose dont on n’est pas responsable). Quand on est responsable c’est différent. Quand on n‘est pas responsable on ne doit pas avoir une nuisance de son passé, qui nous empêche de vivre toute sa vie, si on n’est pas responsable. Si l’on tue, si l’on viole, on peut éventuellement être malheureux toute sa vie mais c’est nous qui avons causé le tort, donc c’est différent.Il y a une différence entre ce que nous causons et ce que les autres nous causent. Pourquoi souffrir de quelque chose dont on n’est pas responsable ? Il faut donc accepter la déprogrammation. Si l’on n’accepte pas, on continue à souffrir d’un passé douloureux, donc il faut mieux accepter : « j’ai vécu un divorce, j’accepte, si ça s’est fait comme ça c’est que ça devait se faire et peut-être que j’aurais été malheureux encore plus si cela ne s’était pas fait, etc ».
  7. Pardonner à ceux qui vous ont offensé. Je ne dirais pas comme dans la Bible, c’est pardonné au moins à soi-même d’avoir été malheureux pendant des années à cause d’un fait dont on n’est pas responsable. Si l’on peut pardonner à l’autre c’est encore beaucoup mieux. (Pardonner à son ex-épouse ou son ex-époux, pardonner à un parent qui a été violent). Pardonner à un violeur, c’est extrêmement difficile pour les femmes qui l’ont vécu, mais certaines ont réussi. J’en donne un ou deux exemples dans le livre : une dame qui a réussi à pardonner en libérant sa colère en envoyant à son violeur un sexe masculin fait en pâte à sel avec recommandé et accusé de réception.Mais on doit pouvoir pardonner à tous. Certains y arrivent difficilement mais cela peut se faire. Une fois que l’on a déprogrammé tout ça, on peut penser au fait sans que cela vous fasse remonter la moindre émotion et donc sans que cela ne nuise à votre présent.

RL : C’est un travail que l’on peut faire seul ou faut-il être accompagné ?

 Dr Amiot : Souvent, il est préférable d’être accompagné par un thérapeute en thérapie cognitive mais on peut y arriver seul. Ce travail prend généralement la forme d’un écrit qui permet de lever la manipulation, le déni ou l’évitement que l’on a mis en place.

Libérer la colère, on peut le faire soi-même en achetant, par exemple, un punching ball et mettre la photo de celui qui nous a fait du mal, taper dessus quelques minutes sans que ça devienne de la haine. Jamais de haine, jamais de jugement mais au moins pour libérer sa colère.

Après, faire son deuil. Normalement, cela peut se faire seul, mais on peut être aidé par un ami, un thérapeute, un conjoint …  Attention, il faut être solide pour faire seul la déprogrammation, il faut arriver à gérer ses émotions avant de déprogrammer. Des émotions arrivent qu’il faut savoir contrôler. Cela se fait à l’aide de la thérapie cognitive.

RL : Donc c’est bien aussi de se faire accompagner ?

Dr Amiot : C’est mieux de se faire accompagner mais le souci, c’est que des thérapeutes en thérapie cognitive comportementale, il y en a peut-être deux pour 150 000 personnes donc c’est un peu compliqué. Si on peut y arriver tout seul c’est bien, au moins pour des petits faits, pour s’entraîner. C’est comme tout, c’est un apprentissage.

Une fois qu’on sait le faire, on peut arriver petit à petit à des points de plus en plus compliqués, de plus en plus graves et y arriver très bien à la fin. C’est donc un entraînement. C’est comme la gestion des émotions. Il y a une jeune femme qui m’a contacté récemment et qui m’a dit « je n’ai pas besoin de papier pour le faire tel que vous me le demandez, mais je le fais de tête comme ça ». Donc c’est le signe qu’elle a avancé pour pouvoir le faire automatiquement.

Fin du 1er volet.


Pour écouter ce 1er volet, cliquez sur Play ou faites un click droit ici pour le télécharger.


Et vous… comment trouvez-vous le bonheur ? Faites moi part de votre expérience dans les commentaires 😉

2 commentaires sur “Comment trouver le bonheur en soi ? #1

  1. Il y a tellement de choses à gérer quand une émotion remonte, que parfois cela peut paraître difficile à identifier. Trouver la bonne façon de le faire est essentielle pour ne pas se décourager. Certaines émotions sont là, mais quelques fois, nous ne savons pas d’où elles viennent exactement. Le subconscient est aussi là pour nous protéger. Dans certain cas, il est bien de ne pas faire resurgir la cause profonde de nos émotions. Mais juste apprendre à les gérer pour ne pas qu’elles nous encombrent, nous bloquent, nous empêchent d’avancer. Les mettre en sourdine, en attendant de pouvoir l’affronter.
    merci pour cet article très intéressant 🙂

    1. Merci Pasalle pour cette contribution. Je pense que j’aurai l’occasion de revenir sur les émotions car il s’agit d’un élément fondamental dans la manière dont nous vivons (et interprétons) les événements de notre vie. Dans sont ouvrage « Les émotions : du normal au pathologique », Stéphane Rusinek évoque jusque 67 stratégies recencées pour faire face à une émotion. Mais chacun d’entre nous n’utilise que trois ou quatre stratégies de manière régulière.
      Ces stratégies sont globalement rangées en deux grandes classes :
      1) Celles centrées sur le problème, comme par exemple la recherche d’information, l’évitement de situations stressantes, etc.
      2) Celles centrées sur l’émotion (la situation reste inchangée) comme la recherche de ce qui est positif, stratégie pour ne pas se faire de soucis, etc.

      On compte jusque 67 stratégies qui ont été recensées, comme « la résolution de problème », « la fuite », etc.

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